La voiture sans chauffeur – du rêve à la réalité

Imaginez-vous que le retour à la maison est le moment le plus reposant de votre journée : installez-vous confortablement, écoutez votre station de radio favorite, envoyez quelques courriels et versez-vous un bon café, tout cela sans même jeter un coup d’oeil sur la route et sur la circulation qui vous entoure.

Une utopie? Le Nevada, la Floride et la Californie ont déjà approuvé l’octroi de licences à des voitures sans chauffeur. Ces véhicules ont également eu la cote lors du Consumer Electronics Show 2014 qui s’est tenu à Las Vegas du 7 au 10 janvier. Les prototypes sont équipés de capteurs à 360° à la fine pointe, d’un système de repérage par satellite intégré et de détails de design ultrasophistiqués. Mais surtout, cette voiture promet d’éradiquer ce que l’Organisation mondiale de la santé considère comme la cinquième cause de mortalité dans le monde d’ici 2030 : la mauvaise conduite.

À court terme, l’élimination du « facteur humain » dans la conduite automobile aurait essentiellement pour effet de supprimer les accidents, la conduite en état d’ébriété et les limites d’âge imposées aux conducteurs, tout en libérant une grande partie de la population des entraves à la conduite. Et ce n’est que le début.

Les considérations de sécurité, comme la visibilité du conducteur, la solidité des matériaux, les pare-chocs, les coussins gonflables, les ceintures de sécurité et les divers rembourrages, dicteront de moins en moins la conception des voitures sans chauffeur. Les designers pourront laisser libre cours à leur imagination et le choix des applications visant à agrémenter votre expérience sera sans limite.

Avec le lancement de la voiture sans chauffeur de Google, la compagnie formule sa vision pour l’avenir, décrite dans un article publié par le magazine Forbes de janvier 2013. L’interconnectivité entre les voitures favoriserait une synchronisation optimale, réduisant ainsi les temps d’immobilisation et le nombre de voyages inutiles. Résultat? On prédit qu’il y aura 90 % moins de véhicules sur les routes. Vous n’aurez qu’à faire un appel et la voiture autonome la plus proche arrivera devant votre porte en quelques minutes. La consommation de pétrole chuterait, le réseau routier serait considérablement réduit grâce à ce nouveau mode de conduite plus précis et environ un tiers des espaces de stationnement pourraient servir à d’autres usages. Google prédit également que le temps perdu dans les transports pourrait diminuer de 90 %, tout comme le nombre d’accidents de la route.

Mais il reste du chemin à parcourir....

Nous connaissons déjà très bien les pilotes automatiques dans les avions, les trains sans conducteurs et les minifourgonnettes qui se conduisent pratiquement d’elles-mêmes au moyen des systèmes avancés d’assistance au conducteur (ADAS), dotés de fonctions d’avertissement et de guidage, de régulateurs de vitesse adaptatifs, d’alertes en mode recul, de freinage automatique et d’aide au stationnement. Mais la voiture sans chauffeur annonce un véritable bouleversement de notre mode de vie. En effet, l’industrie automobile pourra-t-elle prendre le virage technologique de façon rentable, sans se départir de ses travailleurs non spécialisés? Quelles mesures devront être prises pour gérer les données de repérage recueillies par ces voitures intelligentes et protéger notre confidentialité?

Dans un article publié par the Economist, l’auteur émet des hypothèses difficiles : « Au fur et à mesure que les voitures sans chauffeur deviendront plus intelligentes et plus répandues, elles seront appelées à « prendre des décisions vitales » dans des situations imprévisibles, ce qui leur confère, ou donne l’impression de leur conférer, une certaine forme de responsabilité morale.

L’article met de l’avant certains facteurs à considérer. « Premièrement, des lois devront être mises en place pour déterminer qui est responsable en cas d’accident : le concepteur, le programmeur, le fabricant ou l’opérateur? Ensuite, lorsque des repères éthiques sont programmés dans des robots, les décisions que prennent ces derniers doivent être celles que prendraient la plupart des gens. Plus on répondra rapidement à ces questions, plus facile il sera pour l’humanité de profiter pleinement des avantages certains de ces nouvelles technologies. »

Henry Blumenthal, vice-président de la région du Québec pour belairdirect, a la sagesse de reconnaître l’importance du temps pour comprendre cet avenir incertain. « Il reste encore beaucoup de choses à éclaircir et ces variables guideront la nouvelle approche à adopter en ce qui a trait aux responsabilités du conducteur. Avec les voitures sans chauffeur, cette responsabilité devra sans doute passer du côté des fabricants et du réseau routier, entre autres. Avec le temps, les conducteurs auront de moins en moins de responsabilités et bénéficieront de plus en plus d’avantages. Mais comment s’assurer que cette nouvelle dynamique améliore réellement notre vie au quotidien, notre société et l’environnement, tout en créant de l’emploi et en assurant la rentabilité de l’industrie? Si nous nous attachons à placer la sécurité et le bien-être de chacun au cœur de ces progrès, alors nous pourrons faire les bons choix. »

Et qu’en est-il de l’expérience de conduite? Depuis des décennies, les grands constructeurs automobiles s’efforcent de développer notre amour de la conduite et alimentent nos désirs et notre volonté de  payer davantage pour des véhicules de qualité, au maniement tout en souplesse et en précision. Les campagnes de Volkswagen et de Mercedes, toutes deux axées sur la passion de conduire, pourraient bien se retrouver dénuées de sens le jour ou les conducteurs n’auront plus de volant entre les mains. Après tout, qui n’adore pas conduire?

Crédit photo: BMW